
Me voilà au Marshall Chess Club, posant, avec une classe naturelle, au côté de Jaan Ehlvest, 4 fois champion du club et qui fut, à la fin des années 80, dans le TOP 5 Mondial.
Disponible, le grand-maître estonien m'avoua n'avoir jamais trop joué en France, sauf quelques parties pour l'équipe de Montpellier, au début des années 90, à cause de son français défaillant. Aujourd'hui entre Londres et New-York, il continue sa carrière échiquéenne en petit père tranquille, loin des super-tournois qu'il a connus à la fin des années 80, gagnant, l'année dernière, le Liberty Bell à Philadelphie.
Initié très tôt par des parents physiciens, le jeune Jaan fut très vite repéré pour son talent et intégra la célèbre Ecole Botvinnik, en URSS, qui formait la future élite échiquéenne. De la même génération que Kasparov, le jeune Ehlvest rencontra quelques fois le futur "Ogre de Bakou", dans les compétitions Jeunes, notamment à Moscou, en 1977.
Ehlvest vient de sacrifier la qualité en jouant 39.Tb7 x g7 TxTg7 40.Ff6 ?
Vous avez trouvé ? clouant la Tour en g7 ...Mais l'azeri va, lui aussi, illustrer le thème du clouage entraînant l'abandon immédiat de l'estonien.
D'ailleurs, le futur champion du Monde, fut un peu la bête noire de l'estonien puisque sur 13 rencontres, le score sera sans appel en faveur de Garri, +8, 5 nulles, -0 !!
En 1982, il devint champion d'Europe Junior, à Groningue, obtenant le titre de Maître International.
1987 sera l'année de la consécration, finissant 3eme du 54eme championnat d'URSS, il finira second de l'Interzonal de Zagreb, derrière l'inoxydable Viktor Korchnoi, mais devant des pointures comme Nogueiras, Torre ou Poulougaievsky.
Inkiov vient de jouer 41.Td3, quelle fut la réponse d'Ehlvest ?
Sa victoire à Vrsac parachèvera cette année exceptionnelle, le n°1 du tournoi, le bulgare Kiril Georgiev fut lui aussi emporté par l'ouragan estonien.
Le bulgare vient de jouer son Roi en f6 ... l'estonien répondit ...
Mais à Saint-John, en 1988, le rêve mondial d'Ehlvest se fracassa sur le jeu inspiré d'Arthur Youssoupov, autre surdoué des échecs soviétiques. Il n'empêche que le joueur estonien, fort de ses bons résultats, fut invité dans la cour des grands, dans les super-tournois de l'époque.
3eme lors de la World Cup, à Belfort, en 1988, derrière le célèbre duo des 2 K, Jaan montrait que son quart de finale des Candidats n'était pas usurpé, Ulf Andersson pouvait en témoigner !
Andersson vient de jouer son Roi en h8, pouvez-vous trouver la réponse du joueur estonien qui va provoquer l'abandon du suédois ?
Il confirmera à Reykjavik, en 1988, terminant 4eme derrière Kasparov, le bosniaque Pedrag Nikolic s'en souvient encore !
Les blancs ont le trait et matent en 4 !
L'année 1989 fut du même acabit, avec des résultats honorables, dans la forte World Cup. Après un passage en France, lors du fort tournoi de Clermont-Ferrand,
(Quel est le 41eme coup des blancs qui fera rendre les armes à Andreï Sokolov ?)
sa victoire au célèbre tournoi de Reggio Emilia, devant Karpov et Ivanchuk fut le sommet de sa carrière. Voici une partie contre l'américain Nick de Firmian , qui souligne bien la maîtrise de la Sicilienne Scheveningue part de l'estonien :
Comme le soulignera Elvhest dans son dernier livre, The story of a chess player,cette période de 88 à 89, fut son sommet échiquéen, puisqu'il il entra dans le Top 5 mondial !
Depuis Jaan, diplômé en psychologie, n'a plus retrouvé cette forme olympique, mais continue son petit bonhomme de chemin, en jouant des tournois et des opens moins prestigieux. Il gagna le tournoi fermé de Novosibirk, en 1993, celui de Villa Martelli, en 1997, devant Tkachiev et Sutovsky, et il se permit, lors du championnat du Monde Fide à New Delhi, en 2000, de passer 3 tours et de sortir Ivanchuk !!
Cette partie tourne autour du contrôle de la case c4, preuve que le jeu de l'estonien ne se résume pas à des joutes tactiques :
Ehlvest tombera en quart de finale contre le jeune Grischuk.
L'année suivant, en 2001, au championnat du Monde à Moscou, l'estonien réitèrera une bonne performance, en sortant, au 1er tour, Teimour Radjabov, puis Campora et Smirin avant de tomber sur Bareev.
Depuis lors, le joueur estonien écume surtout les tournois américains, remportant quelques opens, et a perdu, assez sèchement, en 2007, un match contre le programme Rybka.
Bonne continuation, Jaan !
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